le ping bon pour la santé

Le ping pong prend à revers Parkinson et Alzheimer

(Le Monde du 18/02/2018)

Ludique, convivial, transgénérationnel, le tennis de table devient aussi un sport sur ordonnance en France. Ses bénéfices sont multiples, tant sur le cerveau que sur le système musculo-squelettique et la condition physique

« Dix mille pas et plus ». Promis, juré, les deux rédactrices de cette chronique [Sandrine Cabut et Pascale Santi] n’y sont pour rien. Mais quand même, le symbole est fort : il y a quelques mois, le dernier espace fumeur du Monde, à la cafétéria, a été remplacé par une table de ping. Oui, on ne dit plus ping-pong, mais ping, même si la fédération de ce sport en pleine mutation s’appelle toujours Fédération française de tennis de table (FFTT).

Outre ses vertus récréatives et de socialisation, chercheurs et médecins louent ses nombreux atouts pour la santé. « Ce qui est intéressant avec cette activité, c’est qu’elle est intermittente, avec des phases de jeu plus ou moins intenses, entrecoupées de courtes pauses de récupération. Elle a donc l’avantage de solliciter le système cardio-respiratoire, ce qui développe l’endurance », explique Sébastien Ratel. Cet enseignant-chercheur en physiologie de l’exercice à l’université Clermont-Auvergne énumère aussi les bénéfices pour la coordination, l’équilibre, l’adresse, la vitesse de réaction, la prise de repères spatio-temporels, la vision périphérique…

« Une pratique régulière contribue à maintenir l’autonomie et la socialisation le plus longtemps possible », Sylvie Selliez, médecin du travail

Le Médicosport-santé, dictionnaire qui évalue quatre familles de paramètres (condition physique générale, système musculo-squelettique, fonctions cognitives, intérêt psychosocial), cote les effets potentiels du ping « très importants » – score maximal – sur les fonctions cognitives et la condition physique, et « importants » sur le système musculo-squelettique.

« C’est l’un des sports par excellence pour les personnes avec des troubles neurodégénératifs. Une pratique régulière contribue à maintenir l’autonomie et la socialisation le plus longtemps possible », souligne Sylvie Selliez, médecin fédérale qui a participé à l’élaboration de cet ouvrage médical des pratiques sportives, réalisé sous l’égide du Comité national olympique et sportif français.

Féminiser l’activité

De plus, les contre-indications médicales sont rares. « Comme dans bien d’autres disciplines, les données proviennent surtout de travaux physiologiques. Les études cliniques sont encore peu nombreuses et portent sur de faibles effectifs », reconnaît le docteur Selliez.

Patients et praticiens font, en tout cas, état d’amélioration des symptômes de la maladie de Parkinson. « J’avais arrêté de jouer de la guitare cinq ans après mon diagnostic de Parkinson. Mais quand j’ai commencé à jouer au tennis de table, je me suis senti à 50 % mieux. J’ai repris la guitare », a ainsi témoigné le musicien américain Nenad Bach. Un championnat du monde des pongistes parkinsoniens sera organisé pour la première fois fin 2019, près de New York.

La petite balle a aussi le vent en poupe pour les patients atteints d’Alzheimer. Des programmes spécifiques se sont développés, notamment aux Etats-Unis et en Angleterre. En France, le Levallois Sporting Club (Hauts-de-Seine) a lancé, il y a un an, un programme « Ping4Alzheimer », le premier en France. Quelques études préliminaires ont suggéré des effets bénéfiques de cette activité sur le cerveau de personnes âgées et de patients en rééducation neurologique. Mais des données solides et à long terme manquent encore.

Comme d’autres fédérations sportives, la FFTT cherche à développer les pratiques de loisirs (dès 4 ans) en entreprise et dans un cadre santé. Avec Etienne Filliard, kinésithérapeute à l’Insep, Sylvie Selliez a élaboré des modules de formation pour les encadrants, avec un premier niveau pour enseigner à des populations vieillissantes sans gros problème de santé, et un deuxième pour le « ping sur ordonnance ». « Le ping santé va vraiment démarrer en 2020 quand des encadrants seront formés », précise la médecin fédérale. L’ambition est aussi de féminiser l’activité, masculine à plus de 80 % parmi les 210 000 licenciés des 3 457 clubs.

En club, chez soi ou dans les jardins publics, on peut en tout cas jouer longtemps. Le plus ancien licencié de la FFTT, pongiste depuis 1928, est centenaire et participe toujours à des compétitions.
Sandrine Cabut

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